Ahora Island – Ile de l’amour et chasse aux kiwis

Ne vous fiez pas au GPS.

Enfin, non, fiez vous au GPS pour les directions. Ne vous fiez pas au GPS pour le temps de route. Pas d’autoroute; au mieux, une voie express à deux voies. Mais une fois quitté Auckland, la route, c’est gros comme une nationale, et limitée à 100 km/h. On les atteint rarement : il y a des camions gigantesques chargés de troncs d’arbres, des travaux (beaucoup), et énormément de virages, de tournants, de courbes, des épingles, qui forcent à ralentir. Le panneau annonce la vitesse du virage : 75…parfois 60… parfois 45… il faut ralentir beaucoup plus.

Il fait chaud et beau, et je suis en voiture, dans un trajet qui me semble interminable.

Je vois défiler les noms des lieux touristiques, en me disant que j’aurai peut-être le temps de m’y arrêter au retour, ou d’y revenir la semaine prochaine, quand je serai en woofing.

Je m’arrête sur une aire de repos, pour profiter de la vue sur la baie des îles. C’est superbe, mais il y a encore mieux. Deux jeunes femmes tiennent une roulotte de cafés et pâtisseries. Je demande un muffin aux myrtilles, mon régal… et là, surprise : on me demande si je le veux avec du beurre.

Oui ! Oui bien sûr que je veux mon muffin chauffé avec du beurre ! D’après elles, c’est typiquement kiwi : dès qu’ils peuvent, ils rajoutent du beurre. Je leur parle du kouignamann. Elles notent le nom, rêvent de beurre salé. On s’entend très bien. Culture universelle.

J’atteins l’étape que je me suis fixée : Aroha Island.
Aroha veut dire “amour” ou “compassion” en Maori. Ne vous emballez pas, ce n’est pas l’île de la tentation.

Il s’agit d’une petite presqu’île, réserve naturelle à kiwis. Le camping est quasiment désert; nous sommes cinq campeurs. La propriétaire m’appelle “honey”, me donne un emplacement enherbé le long de la plage. Elle m’explique comment voir les kiwis la nuit.

Je pique une tête dans la mer. Elle est encore fraîche, c’est le printemps, mais après une journée de voiture, c’est tout ce dont je rêvais.

L’eau chaude de la douche est payante : un dollar pour cinq minutes. C’est courant dans les campings: l’eau est un luxe, encore plus si elle est chaude ou potable.

Alors que je profite des derniers rayons du soleil, mon voisin d’emplacement, un allemand (Hauke : Il était très embarrassé par son prénom, apparemment très “campagne profonde allemande”) me demande si je veux me joindre à lui et une autre campeuse pour la chasse aux kiwis ce soir. Pourquoi pas. On y sera tous de toutes façons.

Il faut attendre la tombée de la nuit, et y aller avec une lumière rouge (elle n’effraie pas les kiwis). On fait le tour de l’île, on tend l’oreille. Ça bruisse dans les buissons, mais est-ce bien nos bêtes à plumes ?

Enfin, on s’assoit sur un banc, et on attend. On désespère, nous n’entendons même pas le cri guttural du kiwi (car oui, cet oiseau ridicule a aussi un cri terrifiant, surtout la femelle).

Et alors que nous nous apprêtons à rentrer (j’ai froid !), soudain… non pas un, mais deux cris de kiwi, très proches, se répondant, à un mètre ou deux seulement ! Les buissons s’agitent, mais on n’y voit goutte ! Je tente de me rapprocher : Là ! Une silhouette de kiwi ! Il disparaît aussitôt dans les fourrés.

On l’entend, mais on ne le reverra plus.

Mes compagnons de chasse n’ont rien vu.

J’ai été bien chanceuse d’apercevoir son ombre.

Adresse : Ahora Island, 23$NZD, + 2 dollars pour une douche chaude de dix minutes, cuisine bien équipée.